26 - Première fois...
Il 19h30 lorsque Chloé sonne à la porte d’entrée.
Une demi-heure de retard ! J’ai cru devenir fou. Chaque seconde qui s’égrenait faisait grossir un peu plus la boule de stress qui me montait dans la gorge.
Un vrai supplice.
Avant cela, j’avais essayé de bosser en me levant tôt le matin.
D’ailleurs, je n’avais pas eu à me forcer. Ma mère m’avait téléphoné à 7 heures pour vérifier que j’étais bien levé et que j’allais mettre ces deux jours à profit et ne pas glandouiller.
_ Je vais vérifier que tu travailles bien tu sais ! Je te téléphonerai à l’improviste dans la journée !
_ Ouais, ouais, fais ça m’man. On sait jamais des fois que je m’évade !
_ Ne prends pas ce ton avec moi Romuald ! Tu as plutôt intérêt à travailler dur et à l’avoir ce bac. Sinon l’année prochaine on te fera vivre un enfer ton père et moi.
_ Tu me donnes super envie de bosser là m’man, merci.
_ ... Excuse moi tu as raison. Allez, bonne journée… et travaille bien !
_ Ok. Merci m’man. Bonne journée aussi.
Les parents sont casse couilles. C’est pour notre bien mais c’est quand même casse couilles.
J’ai bossé du mieux que j’ai pu en essayant de ne pas trop penser au moment où Chloé allait venir. Je peux dire que la matinée fut assez bien travaillée. L’après-midi par contre, j’étais de plus en plus fiévreux à mesure que le temps passait.
Et puis je me suis rendu compte que d’une part je n’avais pas assez à manger pour deux (ma mère n’ayant bien évidemment pas prévu dans ses petits plats une personne supplémentaire le samedi soir), et que d’autre part, je n’avais pas de capotes.
Je me voyais mal aborder le moment fatidique et demander à Chloé :
_ T’aurais pas des capotes par hasard ?
L’insulte ! Non seulement je n’en avais pas prévu mais en plus je sous-entendais qu’elle couchait partout et en avait en permanence avec elle.
Non, mieux valait être prévoyant.
Je me suis rendu à la supérette en face du Cofy Café, j’ai acheté les ingrédients pour faire une quiche et me suis arrêté au retour à la pharmacie.
J’aurais aimé que ce soit un vieux monsieur tout gâteux qui me serve mais non, bien évidemment ce fut une charmante jeune préparatrice au sourire merveilleux qui me servit :
_ Jeune homme ! Je peux vous aider ?
Déjà, avec jeune homme, ça commençait mal.
_ Euh, oui ! Je... hum… je voudrais… des… (*picotement dans le dos*)… des préservatifs !
_ Pardon ! Je n’ai pas entendu ?
_ Hum ! (*Eh merde !*) Je voudrais des préservatifs !
_ Ah oui. Quel type ?
Houlà, je l’avais pas prévue celle-là !
_ Euuuh… je sais pas ! Normal, quoi !
_ Alors, nous avons le Full Love Pack©, le Performa©, le Xtra-pleasure©, le Futur©, le King-Size©, le Fetherlite©, le Elite©, le Crystal©, le Contact© ou alors ceux aromatisés fraise, banane, menthe ou chocolat !
J’étais rouge comme une pivoine et ça a du se voir. La préparatrice voyant mon embarras en choisit un et me le tendit :
_ Tenez, prenez celui-là. Il est très bien.
Je payais les capotes et me jurais de ne plus jamais revenir dans cette pharmacie avant d’avoir des enfants.
Lorsque j’ouvre la porte, Chloé baigne dans les rayons d’un soleil couchant.
Elle a noué ses cheveux à nouveau avec la baguette blanche nacrée. Des mèches retombent dans son cou. Elle porte une robe à fleurs discrètes, un petit pull moulant violet et sa veste beige.
Elle est magnifique. De toute façon, je crois que même dans un sac poubelle le crâne rasé je la trouverais belle.
Le repas est assez silencieux.
Ma quiche est plutôt réussie mais on n’en parle pas.
Puis à un moment, nos regards se croisent. J’ai envie d’elle tout autant que je redoute le moment crucial.
Elle aussi en a envie, je peux le lire dans ses yeux.
On se retrouve dans ma chambre. Je l’embrasse sur la bouche. Nos langues se mêlent, font plus ample connaissance. Chaque baiser est une découverte. Le tout premier contact de sa langue sur la mienne m’envoie des décharges dans le slip. Je ne sais pas à quoi c’est dû mais ça me fait sourire.
Elle sent bon. Sa peau est douce et délicate.
Nos respirations sont fortes et saccadées. On se caresse, on déboutonne, on dé zippe, on délace, on enlève, on arrache… on est nus !
Elle a un corps de rêve. Sa peau est ambrée. Ses cheveux retombent en cascades sur ses épaules saillantes.
Des seins sont ni trop petits ni trop gros. Elle me regarde.
Soudain je me rends compte de ma nudité et me sens gêné. Elle vient vers moi, passe ses bras autour de mon cou et éteint la lumière.
Je bande. Je sens son corps avec le mien. Elle est chaude.
On se caresse à nouveau puis on s’allonge sur le lit.
Elle prend la situation en main, me dirige, me conseille, me sensibilise.
J’ai l’impression de m’y prendre comme un manche mais si c’est le cas elle n’en montre rien.
Je délire de bonheur. Tout est si nouveau et tellement délicieux que j’en perds la tête. L’anonymat du noir me dope et chaque sensation est exacerbée par mon imagination.
J’aime les soupirs qu’elle pousse, les mouvements qu’elle fait.
Tout est si intense que je suis bien trop rapide.
Ca ne fait rien qu’elle dit, on va recommencer. J’aimerais bien, mais tout de suite après j’ai plus envie ! Pourtant ce n’est pas l’envie qui me manque.
Mais elle sait ce qu’elle dit. Après un câlin tendre, ses caresses me remettent vite dans l’action et l’on recommence.
Ca fait mal mais c’est bon.
Lorsque nous sommes enfin repus d’amour et de baisers, Chloé se lève vers la salle de bain.
J’allume. La lumière crue nous éblouit. Sur mon bureau, traîne encore le journal de Chloé. Comme un con j’ai oublié de le planquer.
A ce moment, elle reste interdite devant le bureau puis se retourne vers moi et plonge un regard dans le mien que je n'oublierai jamais...